par Steve Vander Ark, le 28/03/2002.
La comparaison entre la vieille magie de l’univers de Harry Potter et la magie de l’aube des temps de la série Narnia de C. S. Lewis est inévitable. Il y a de claires similitudes entre les deux, bien qu’elles ne soient pas identiques.
Dans Harry Potter comme dans Narnia, on retrouve l’idée d’une forme de magie plus forte et plus intrinsèque que la magie de tous les jours pratiquée à l’aide de livres ou de baguettes. Cet ancien type de magie est dans un sens ancré dans l’essence de la réalité. Cette magie se manifeste à travers les actions sincères et profondes de chaque personne et ne peut pas être manipulée pour devenir autre chose que ce pour quoi elle a été créée. Lily se sacrifie pour sauver son fils et il en résulte une protection plus forte que le sortilège de mort lui-même. C’est presque une image christique, mais il est presque certain que Rowling ne tenait pas spécialement à véhiculer cette image, puisqu’elle n’écrit pas une allégorie.
Cependant Lewis écrit une allégorie, ce qui signifie que sa forme de magie ancienne recèle autre chose dans sa conception du monde chrétien. Il parle d’une réalité où il y a clairement un Autre Lieu et Espace-Temps, représentant le royaume de Dieu, et c’est de cette source que la magie la plus puissante provient. Aslan se sacrifie pour payer la traîtrise d’Edmund et de ce fait, Aslan renaît plus fort que jamais. C’est clairement une image christique et la magie qui permet un tel miracle provient du pouvoir de Dieu. Chez Lewis, cette connection est intentionnelle.
Dans la réalité imaginaire de Rowling, il n’y pas d’Autre Lieu ou d’Autre Espace-Temps. La magie n’est pas un pouvoir mystique et canalisé émanant de quelque source occulte ou surnaturelle. Elle est complètement commune dans le plus pur sens du terme. Elle est aussi simple, courante et ennuyeuse que le sont la roue ou l’électricité pour nous. Même la vieille magie, quoique impressionnante et puissante, n’est rien d’autre qu’une technologie magique à son point le plus avancé. Et cette différence entre Narnia et le monde de Harry Potter est critiquable dans toute comparaison entre les deux séries.
Dans chacune, la magie est utilisée la fois par des bons et des mauvais. Dans chacune, il y a des enchantements, des potions, des baguettes magiques et des livres de sorts : tous les éléments du conte de fées classique. Les deux séries définissent la magie comme étant neutre et montrent que ce sont les hommes qui décident dans quel but la magie sera utilisée. Dans chaque cas, c’est la responshabilité de la personne qui jette le sort de s’assurer que ses motivations sont bonnes. Dans chaque série, la magie peut être utilisée pour faire des choses terribles et atroces, mais dans Narnia, la magie est la manifestation d’une force surnaturelle. L’ancienne magie est alors une allégorie d’un Dieu se dévoilant, lui et ses intentions, à travers sa création, appelée parfois “révélation complète”. Aslan peut ressusciter parce que c’est écrit ainsi dans l’essence même de la Création.
Dans l’univers de Harry Potter, la magie ne provient pas d’une source surnaturelle. L’ancienne magie n’est alors pas un genre de lien ou l’image d’une personnalité inhérente à cet univers, c’est juste une partie intégrale et inévitable de l’essence de la réalité. Mais elle reflète la moralité inhérente de ce monde, une hypothèse de ce qu’est le bien et de ce qu’est le mal. Dans l’univers de Harry Potter, une puissance est accordée à ceux qui font le bon choix. Le sacrifice de soi donne un certain pouvoir, il y a aussi une force dans les liens familiaux. La mort elle-même est puissante – après tout, aucun sortilège ne peut empêcher la mort – et c’est contre toutes ces choses que Voldemort se bat. Le concept du pouvoir ultime selon le Seigneur des Ténèbres est de briser les lois qui régissent l’univers. Il est en quête d’immortalité. Ce qu’il ne réalise pas est que le pouvoir ultime ne vient qu’en laissant se déverser la magie intrinsèque de l’univers. C’est ce que fait Harry, depuis les liens familiaux auxquels il s’attache jusqu’à ses actions de dévouement. Harry a même contrecarré la mort, mais pas grâce à de grotesques manipulations ou l’utilisation de la magie noire, mais grâce aux pouvoirs que Voldemort rejette précisément. Harry a été sauvé par l’amour.
L’ancienne magie dans l’univers Harry Potter n’est pas la magie de l’aube des temps. Mais toutes deux reflètent la bonté de base et la moralité des mondes dans lesquels elles apparaissent.