jeudi 21 novembre 2024

Les secrets de la liste des élèves

par Diana Summers, le 28/01/2006.

Note : l’essai qui suit débat sur des théories et suppositions sur les domiciles, les appartenances ethniques et d’autres données biographiques de plusieurs élèves dans l’année de Harry, s’appuyant sur les noms et la démographie du Royaume-Uni. Il ne doit pas être considéré comme canonique mais est hautement divertissant et instructif. Bonne lecture !

Introduction

Ca n’a duré qu’une seconde. J.K. Rowling a accepté de parler de son oeuvre dans un documentaire télévisé, Harry Potter et Moi. Elle a pris des feuilles au hasard dans ses innombrables cartons de brouillons. Elle a exhibé rapidement une page avec un bref commentaire : “Ceci est la liste de tous les élèves de l’année de Harry”. Elle a dit ça comme ça, pour montrer à quel point ses notes étaient détaillées. Elle ne s’attendait certainement pas à ce que les fans prennent cet éclair de papier au sérieux.

Mais les fans de Harry Potter, bien sûr, prennent tout au sérieux. Ceux qui avaient enregistré Harry Potter et Moi ont vite fait des captures d’écran de leurs scènes préférées. Ce n’était qu’une question d’heures pour que la liste des élèves soit diffusée sur Internet – vous pouvez la voir ici. La liste d’élèves est devenue l’objet d’une fascination dévorante pour les obsessionnels de Harry Potter qui voulaient connaître littéralement chaque détail sur chaque élève de l’année de Harry. Les auteurs de fanfic arrêtèrent d’inventer des noms pour les camarades de classe de Harry, puisque des noms tels que Kevin Entwhistle ou Queenie Greengrass étaient maintenant disponibles pour envahir chaque histoire.

Qu’est-ce que cette liste nous apprend sur les camarades de Harry ?

Premièrement, les fans n’ont qu’une vision restreinte sur la liste. Les quarante noms s’étalent sur deux pages, et la plus grande partie de la page de droite n’est pas visible. Donc la liste nous en apprend vraiment très peu sur les élèves de la seconde moitié de l’alphabet.

Deuxièmement, ça n’a pas le statut d’information canonique. JKR n’a jamais voulu que cette liste soit quelque chose de plus qu’un brouillon, et elle a changé d’avis plusieurs fois depuis qu’elle l’a fait. Quelques-uns de ces changements sont visibles sur la liste elle-même : on voit “Pupp” et “Puckle” rayés. D’autres changements ont été faits un peu plus tard : il n’y a pas de “Trevor Boot” dans le canon, mais Terry Boot est clairement la même personne. Donc les détails de cette liste ne sont pas nécessairement les décisions finales de JKR ; ils montrent plutôt ce qu’elle pensait pendant qu’elle élaborait son plan.

Le simple fait que JKR ait rayé et corrigé des noms sur sa liste indique qu’elle a beaucoup réfléchi aux camarades de classe de Harry. Elle a de toute évidence une histoire de fond pour chacun d’eux, y compris les dix qui ne sont toujours pas apparus dans le canon et les onze qui ont surtout été de simples figurants. La liste nous donne un aperçu considérable de ce qu’elle a dû penser pendant qu’elle établissait les “arrière-histoires”. Dans le monde de Harry Potter, une liste de noms n’est jamais qu’une simple liste de noms : chaque nom signifie quelque chose. Puisque Sirius est l’étoile du chien, un personnage du nom de Sirius Black doit avoir la capacité de se transformer en un chien noir. “Lupin” se rapporte au mot latin pour “loup”, et Remus était un personnage mythologique qui fut recueilli par une louve, alors un personnage du nom de Remus Lupin doit évidemment être un loup-garou. Pomona était une déesse romaine des fruits, et Chourave se rapporte à une variété de choux (Ndt : “Sprout” en v.o., ce qui signifie “pousse”, peut aussi convenir pour désigner des choux de Bruxelles), donc Pomona Chourave est toute désignée pour enseigner la botanique. On devine aisément que les noms de la liste sont aussi éloquents.

La liste nous indique les noms, les prénoms, le sexe (le carré noirci pour masculin, le carré vide pour féminin), la “pureté” du sang (une étoile encerclée pour sang-pur, une étoile seule pour sang-mêlé, et la lettre N au centre d’un carré pour les sorciers d’ascendance moldue) et la Maison (G, H, R ou S – Ndt : H et R pour Hufflepuff et Ravenclaw, la v.o. de Poufsouffle et Serdaigle). A partir de ces informations, on peut en déduire beaucoup plus.

Le racisme dans Harry Potter : la “pureté” du sang

La “pureté” du sang est très importante dans CS. Elle nous indique qui risque d’être attaqué et qui ne risque rien. Si on ajoute les informations données par la liste à celles du canon, on trouve cinq élèves d’ascendance moldue, douze sang-mêlés, treize sang-purs, et dix élèves dont la “pureté” du sang est difficile à déterminer. Cela signifie que les élèves d’ascendance moldue représentent environ 20% de la promotion, tandis que les sang-purs et les sang-mêlés en représentent 40% chacun.

Cependant, un examen plus soutenu nous montre que ces élèves ne sont pas répartis équitablement dans les Maisons. Gryffondor a un élève d’ascendance moldue, Poufsouffle en a deux, Serdaigle en a deux, et Serpentard n’en a aucun. Gryffondor a trois sang-mêlés, Poufsouffle en a trois, Serdaigle en a quatre et Serpentard en a deux. Gryffondor a trois sang-purs, Poufsouffle en a deux, Serdaigle en a deux, et Serpentard en a six. Il est intéressant de noter que presque la moitié de tous les sang-purs identifiés sont à Serpentard.

Le Choixpeau magique : esprit d’équipe ou rivalité entre Maisons ?

Plaçons la liste d’élèves à côté du canon, et nous découvrons qu’il y a huit Gryffondors, huit Poufsouffle, neuf Serdaigle, neuf Serpentard, et six élèves qu’on ne peut pas répartir. Je pense qu’il est raisonnable d’en conclure que JKR avait l’intention de placer dix élèves dans chaque Maison – cinq par dortoir.

Certains protestent que c’est statistiquement très peu probable. La probabilité pour que quarante élèves – chacun avec une chance égale pour quatre destinations – soient répartis au hasard, puis finissent en quatre groupes de dix égaux, est de l’ordre de 0.03%. Toutefois, il ne s’agit pas d’un exercice de statistique dans la vie réelle. Il s’agit d’un exercice de l’esprit de JKR dans lequel elle invente une communauté magique. Elle a confirmé qu’il y a dix Gryffondors, bien qu’elle ait oublié les noms de deux d’entre eux, ce qui laisse supposer qu’il y a dix Serpentard (pour partager les vingt balais lors de la première leçon de vol dans ES9) et dix Poufsouffle (pour partager les vingt cache-oreilles pendant le cours de botanique de deuxième année dans CS6).

C’est intéressant que JKR ait changé d’avis pour certaines des Maisons. Michael Corner et Anthony Goldstein étaient à l’origine des Poufsouffles, mais ils ont été déplacés à Serdaigle quand OP a été publié. La raison en est évidente – Ron doit nourrir un ressentiment irrationel pour Michael Corner, donc Michael doit être quelqu’un avec qui il n’a partagé aucun cours. Il est aussi possible que JKR ait décidé qu’elle avait réparti trop de sang-mêlés à Poufsouffle. Cela suggère que, pour équilibrer les effectifs, deux des Serdaigles originels ont alors été transférés à Poufsouffle. Je crois que l’un de ces deux-là doit être Stephen Cornfoot, simplement parce qu’il suit Michael Corner dans l’alphabet.

Où peut-on trouver un sorcier ?

L’objectif de JKR, bien sûr, est qu’on puisse trouver un sorcier n’importe où. La communauté magique se cache à côté des Moldus ordinaires. Les sorciers sont des gens normaux en tous points en-dehors du fait qu’il se trouve qu’ils ont un don magique. Un fait surprenant qui saute aux yeux dans la liste d’élèves est que ces enfants représentent un microcosme des îles britanniques.

Ça doit être difficile à saisir pour un lecteur non-britannique. Mais un coup d’oeil sur les noms de famille montre que certains des noms sont très courants, quelques-uns le sont un peu moins, et un petit nombre – ceux destinés à avoir une signification symbolique – sont rares. La liste comprend un “Smith”, un “Jones”, et un “Brown”, parce que ce sont les trois noms de famille connus comme les plus courants en Grande-Bretagne. Puisque Brown est à Gryffondor et Jones à Poufsouffle, je pense que Smith est probablement le deuxième garçon de Serdaigle qui a été ensuite déplacé à Poufsouffle.

La plupart des prénoms sont aussi des prénoms ordinaires du genre de ceux que les parents britanniques donnaient à leurs enfants au début des années 80, mais quelques-uns sont insolites – exactement comme quelques parents choisissent des prénoms insolites dans la vie réelle. Vous pouvez voir des prénoms datés comme “Ronald” et “Millicent”, mais vous ne voyez aucun américanisme flagrant tel que “Kyle” ou “Brittany”, ou même “Chuck” ou “Nancy” ou “Hank” – parce que les parents britanniques n’utilisaient pas ces prénoms en 1980.

Je vais maintenant suivre jusqu’au bout l’hypothèse que ces quarante enfants représentent un microcosme de toute la population britannique, et vous montrer où ça nous amène.

Le sexe

Si chaque dortoir a cinq lits, on s’attendrait à trouver une répartition équitable de vingt garçons et vingt filles. Ce qu’on trouve, c’est dix-neuf garçons, seize filles, et cinq élèves dont le sexe est inconnu. Je parierais que l’un de ces cinq est un garçon.

La classe sociale

La répartition des richesses est encore très inégale dans la société britannique, cela va des millionnaires au plus démunis. Cependant, les statistiques indiquent que 48% de la population se trouve dans le milieu populaire de la société – les gens de la classe ouvrière qui se débrouillent bien ou ceux de la classe moyenne aux revenus modestes. (L’idée de “bourgeoisie” tient plus de l’éducation que de la richesse. Beaucoup de gens de la classe ouvrière sont plus riches que certaines personnes de la classe bourgeoise, et les bourgeois les plus riches vivent dans plus de luxe que les “nobles pauvres”.)

Dans un groupe de quarante enfants, on s’attend à en trouver deux des classes les plus élevées, neuf de la bourgeoisie, dix-neuf des milieux populaires, huit de la classe ouvrière, et deux dont les familles vivent d’aides sociales. Et toutes ces indications correspondent exactement à ce que JKR nous a donné. Les deux issus des classes élevées sont de toute évidence Drago Malefoy et Justin Finch-Fletchley. Je vous dirai plus tard comment on peut classer quelques uns des autres. Cependant, beaucoup des élèves sont difficiles à situer, parce qu’ils sont simplement des gens ordinaires des milieux populaires de la société britannique.

Les environnements urbain et rural

La Grande-Bretagne est une société densément peuplée et très urbanisée. Dans un groupe de quarante élèves britanniques on s’attendrait à en trouver cinq de Londres. On s’attendrait à ce qu’il y en ait dix des autres villes principales – en gros, deux de Birmingham, deux de Manchester, et un chacun pour Bristol, Dublin, Edinburgh, Glasgow, Liverpool et Nottingham. Etonnament, tous ces élèves peuvent réellement être attribués à la bonne ville.

Seulement huit des élèves doivent vivre en milieu rural. Statistiquement, une véritable répartition britannique donnerait un élève d’Eire (Ndt : Irlande), un des Highlands (Ndt : les Hautes Terres d’Ecosse), un de la région des lacs (Ndt : le Lake District, dans le nord-ouest de l’Angleterre), un du nord du Pays de Galles, un du sud-est des Midlands (Ndt : comtés du centre de l’Angleterre), un de l’East Anglia (Ndt : au nord est de Londres), et un des South et West Country (Ndt : le sud ouest de l’Angleterre.). Et il n’y a pas vraiment de problème pour identifier qui habite où.

Les autres dix-sept élèves doivent venir de villes plus petites avec une population de moins de 200 000 habitants. Je ne peux pas vous dire avec certitude où se trouvent la plupart de ces villes, mais je peux vous donner une idée générale d’une répartition possible.

La répartition géographique

La population des îles britanniques est très inégalement répartie, avec un tiers des habitants concentrés dans le sud et l’est de l’Angleterre. (C’est une zone où il n’y a pas d’équipes locales de Quidditch – à l’évidence le Quidditch professionnel est pratiqué secrètement dans des zones peu peuplées.) Je ne pense pas que JKR soit obsédée par les répartitions géographiques comme je le suis (les sites de généalogie m’ont beaucoup aidé), mais en suivant la règle d’un “microcosme de la Grande-Bretagne”, ça a été étonnement facile de localiser le lieu d’origine de chaque élève.

Il devrait y avoir quatre élèves d’origine irlandaise : deux d’Eire, un de l’Irlande du Nord, et un qui a déménagé dans une ville de Grande-Bretagne. J’ai pu en identifier seulement trois : Seamus Finnigan, Gregory Goyle et mademoiselle Moon. Peut-être que JKR n’a pas réussi à sélectionner la famille qui a émigré en Grande-Bretagne.

Il devrait aussi y avoir quatre élèves venant d’Ecosse – et effectivement ils y sont. Il s’agit de Stephen Cornfoot, Morag MacDougal, Ernie Macmillan et Zacharias Smith. L’un devrait être de Glasgow, un autre d’une ville de l’est, un autre des Highlands, et un autre, peut-être, d’une ville des Lowlands. Et ça ira très vite de décider lequel est lequel.

Il devrait y avoir huit élèves originaires du nord de l’Angleterre : trois des agglomérations des environs de Liverpool et Manchester, trois des petites villes du Yorkshire, un du nord-est, et un, peut-être, de la région des lacs (Ndt : le “Lake District”). Et voilà ce qu’on trouve : nos huit nordiques sont Hannah Abbott, Michael Corner, Kevin Entwhistle, Neville Londubat, Pansy Parkinson, Lisa Turpin, et les inconnus Roper et Runcorn. La plupart d’entre eux peuvent être localisés si précisément qu’on peut attribuer un endroit approximatif aux autres. La seule équipe de Quidditch locale pour toute cette zone, c’est les Flèches d’Appleby.

Sept des élèves devraient être des Midlands – deux de Birmingham et son agglomération, un d’une autre ville, deux des petites villes du nord des Midlands, un des zones frontalières du Pays de Galles, et un des environs de l’est des Midlands. Et sept élèves correspondent parfaitement à ces profils : Terry Boot, Mandy Brocklehurst, Justin Finch-Fletchley, Parvati et Padma Patil, Sally-Ann Perks et l’inconnu Spinks.

Seuls deux des élèves doivent être Gallois : Wayne Hopkins et Megan Jones. Il doit y en avoir deux autres d’East Anglia : Susan Bones et Daphne Greengrass.

On peut s’attendre à en trouver trois dans le sud de l’Angleterre ; l’un d’eux est Drago Malefoy, et les autres sont sûrement Millicent Bulstrode et Hermione. Il devrait y en avoir aussi trois de la West Country (cette expression désigne aujourd’hui le sud-ouest de l’Angleterre). Ce sont Ron, Vincent Crabbe et Theodore Nott.

Londres, une ville de sept millions d’habitants, va fournir cinq élèves, et la population de la ville est divisée en parts égales entre le nord, le sud, l’est et l’ouest. Après avoir éliminé tous les élèves qui viennent clairement d’ailleurs, il reste peu de doute : nos Londoniens sont Tracey Davis, Anthony Goldstein, Su Li, Dean Thomas et Blaise Zabini. Il devrait y avoir trois élèves du sud-est des banlieues qui entourent Londres. On sait déjà que Harry est l’un d’eux ; par défaut, les autres sont Lavande Brown et l’anonyme Rivers.

Les origines ethniques

Dans la Grande-Bretagne actuelle, l’immigration est une question délicate à chaque débat politique. Mais en réalité la population est au moins à 92% anglo-celtique. La plus grande minorité ethnique, les émigrés du sous-continent indien, représente seulement 3,5% du total. Dans notre échantillon de quarante élèves, il ne devrait y en avoir que trois qui ne sont pas de familles blanches. JKR nous as donné une légère sur-représentation avec quatre élèves, mais elle a judicieusement réduit l’impact de cette sur-représentation en faisant de deux d’entre eux des soeurs jumelles d’une même famille.

La moitié de ces élèves immigrés devraient être indiens (Parvati et Padma Patil), un autre devrait être noir (Dean Thomas), et un dernier devrait être d’une autre race – certainement chinois (Su Li). La moitié de ces immigrés vivent à Londres (Dean et Su), et les autres vivent dans d’autres grandes villes (puisque Manchester est déjà empli d’élèves qui conviennent le mieux au profil de Manchester, disons que les Patil vivent à Birmingham). Il n’y a qu’une chance sur cinq pour qu’un élève soit juif – quelqu’un d’Europe de l’est plutôt qu’un sémite. Dans ce cas c’est Anthony Goldstein. Il est aussi possible qu’on trouve un nom allemand ou italien. Coucou, Blaise Zabini.

La religion

La Grande-Bretagne est une société avec un fort héritage spirituel mais une faible pratique quotidienne, que ce soit pour n’importe quelle religion officielle. Si on faisait un sondage sur la religion auprès des camarades de Harry, on pourrait s’attendre à ce que dix-huit déclarent être de l’église anglicane, que huit se disent catholiques (parmi eux Seamus Finnigan), qu’un déclare être un presbytérien écossais, qu’un autre dise être un protestant non-conformiste d’Angleterre, qu’un suivant se dise musulman et qu’un dernier ait une religion différente (dans l’ordre des probabilités, l’hindouisme, le sikhisme, le judaïsme ou le bouddhisme). Sept pourraient affirmer ne pas avoir de croyance religieuse du tout (l’un d’eux pourrait vivre en East Anglia et un autre en Ecosse), tandis que trois s’abstiendraient de répondre, probablement parce qu’ils seraient vagues ou incertains à propos de leurs croyances.

Cependant, la pratique quotidienne est très différente des déclarations du sondage. Parmi les quarante camarades de Harry on pourrait raisonnablement s’attendre à un chrétien évangélique qui croit au pardon et lit la Bible (je vous dirai plus tard qui c’est), un autre chrétien plus libéral qui se rend à-demi régulièrement à l’église (quelqu’un plutôt comme JKR elle-même), et un élève qui va à l’église seulement à Noël. Il y a plus qu’une petite chance que l’un de ces trois soit un catholique – oui, on a des catholiques évangéliques en Grande-Bretagne !

JKR a sous-représenté l’islam, puisqu’il n’y a pas de musulman dans la promotion de Harry, mais elle a sur-représenté les religions non-chrétiennes en général, puisqu’on a apparement deux hindous aussi bien qu’un juif. On ne s’attendrait pas à ce que ces trois élèves soient des pratiquant actifs, mais pas non plus à ce qu’ils n’aient de religieux que le nom.

Les héros : Harry, Ron et Hermione

Le cas du trio a déjà été longuement discuté, alors je vais seulement indiquer quelques points précis sur eux.

Le prénom “Ronald” est un diminutif de “Reginald”, un prénom germanique qui signifie “avocat” et “souverain”, et donc souligne la position de Ron en tant que premier conseiller du héros. “Weasley” signifie “prairie de belettes”. Une belette est un animal à la fourrure rousse proche du furet : les belettes et les serpents sont des ennemis jurés qui se combattront jusqu’à la mort. “Weasley” est un nom qui existe vraiment, bien qu’il soit très rare, et il suggère une famille anglo-saxonne. La famille dont vient Mrs Weasley a aussi un nom très anglo-saxon (“Prewett” signifie “fier”). Cependant, la chevelure rousse des deux familles suggère des ancêtres gaëliques. Pour compliquer encore un peu, leur localisation dans le Devon laisse penser que les précédentes générations de Weasley se sont mariés avec des celtes. Il semble que les Weasley d’aujourd’hui sont le fruit d’un mélange de tous les peuples natifs de Grande-Bretagne – ils sont la famille typiquement britannique.

Le prénom “Hermione” est grec et signifie littéralement “appartenant à Hermès”. Comme Hermès était le dieu du langage, cela attire l’attention sur l’aisance d’Hermione à s’exprimer. Dans la pièce de Shakespeare “Un conte d’hiver” la reine Hermione souffre d’un mari jaloux, ce qui nous rappelle la jalousie de Ron envers Hermione. Un “granger” était le surintendant d’une grande ferme ou “grange” – quelqu’un de très respectable, de la bourgeoisie.

Harry, Ron et Hermione habitent tous dans le sud de l’Angleterre. Le village de Ron, Loutry Sainte Chaspoule (Ndt : “Ottery St. Catchpole” en v.o.), est fictif, mais il y a une vraie rivière Otter (Ndt : “otter” signifie “loutre” en anglais) qui traverse le Devon, avec de vraies loutres dans ses eaux. JKR aime les loutres ; en plaçant les Weasley dans leur territoire, elle a apposé son sceau d’approbation sur cette famille. En donnant à Hermione une loutre pour Patronus, elle a peut-être assigné Ron comme protecteur spécial d’Hermione. Little Whinging est aussi une ville inventée, et son nom suggère une certaine prétention – “Whinging” signifie “qui se plaint” et “Little” sous-entend qu’elle n’est pas aussi importante qu’elle le pense. Le Surrey, qui est très proche de Londres, n’a pas de grosses agglomérations mais beaucoup de petites villes ou des villes de taille moyenne. Little Whinging est censée suggérer des villes telles que Guildford, Camberley ou Haslemere.

Hermione doit vivre plus à l’ouest que le Surrey parce que ses parents ne peuvent pas faire le déplacement à Londres aussi facilement que les Dursley. Je vais supposer qu’elle vit à Winchester, l’ancienne capitale du Wessex, et la ville du grand Roi Alfred. Alfred était le roi protecteur de la vérité, de la justice, de la connaissance, de l’ordre et de la mauvaise cuisine, donc cet endroit a dû inspirer à Hermione son intérêt pour l’histoire très tôt dans sa vie.

Harry et Hermione appartiennent tous les deux à la classe bourgeoise : leurs familles conduisent des voitures luxueuses et prennent des vacances en Europe. Tandis que les parents d’Hermione sont des gens instruits – des dentistes qualifiés qui ont donné à leur fille un prénom antique – les Dursley sont des nouveaux riches qui font étalage de leurs possessions. Ron est d’une condition sociale inférieure à Harry et Hermione, mais il n’est pas aussi pauvre qu’il le pense. Ses parents vivent dans une maison de cinq chambres dans le Devon, qui est une région assez chère. Si les Weasley avaient eu moins d’enfants, ou si Mrs Weasley avait choisi de retourner à la vie active, ils feraient sans aucun doute partie de la bourgeoisie. Au lieu de ça, ils ont placé les joies d’une grande famille au-dessus de possessions matérielles qui ne sont pas indispensables. Alors qu’est-ce que ça peut faire si les enfants portent des vêtements d’occasion, si les jouets coûteux sont limités, et si les vacances en Egypte étaient un voyage exceptionnel dans leur vie ? Harry échangerait tous les jouets de la deuxième chambre de Dudley contre une famille comme les Weasley !

Les autres garçons de Gryffondor : Neville, Dean et Seamus

Neville Londubat joue un rôle majeur dans le canon d’Harry Potter, et c’est sûr qu’il y aura plus de révélations sur lui par la suite. Mais qu’est-ce que la liste d’élèves nous apprend de particulier ? Le prénom “Neville” (littéralement “nouvelle ville”) était assez à la mode il y a quelques dizaines d’années, mais il est démodé à la génération d’Harry. Comme sa baguette et sa mémoire, le prénom de Neville ne s’accorde pas vraiment avec la vie courante. “Londubat” (Ndt : “Longbottom” en v.o.), qui signifie “homme de la longue vallée”, a un ton ironique, une couche supplémentaire aux désavantages sociaux de Neville. (JKR a d’abord pensé l’appeller “Pupp”, ce qui n’est guère mieux. Ce n’est pas surprenant qu’elle ait rayé ce prénom, puisqu’il est en fait allemand et presque inconnu dans les îles britanniques. Nous n’avons besoin que d’un seul élève européen pour représenter fidèlement l’immigration européenne.)

Les origines de Neville sont développées dans cet essai : c’est un bon essai, mais j’ai une petite objection de pinailleuse. L’essai affirme que “Londubat” est un nom du Lancashire ; en réalité ce nom est environ douze fois plus courant dans le Yorkshire. Donc, faisons un compromis en disant que Neville habite dans une ville de textile comme Halifax, qui est près de la limite du Lancashire et culturellement très proche. Ca expliquerait pourquoi il passe ses vacances d’été à Blackpool, la station balnéaire préférée des gens des environs. Cela place vraiment Neville dans la même classe sociale que Ron, mais Neville n’est jamais taquiné pour sa pauvreté. C’est peut-être parce que sa famille, avec un seul enfant, peut faire durer l’argent plus longtemps ; mais ça peut aussi nous dire que Neville, contrairement à Ron, ne se tracasse pas d’être pauvre.

Le prénom de Dean Thomas est presque invisible sur la liste, mais il nous est présenté dans le canon comme “un garçon noir encore plus grand que Ron” et “Dean le fan de West Ham”. Ces deux énoncés nous apprennent beaucoup de choses sur lui. Ses grand-parents ont dû être des Indiens de l’ouest qui se sont installés en Grande-Bretagne dans les années 50, quand ses parents étaient petits ou peut-être pas encore nés. En 1990 cette communauté ethnique était très bien intégrée dans la société britannique, bien qu’un nombre disproportionné d’entre eux restât pauvre. Dean est vraiment un garçon de la classe ouvrière. JKR voulait au départ l’appeler “Gary” (un prénom gallois signifiant “faucon blanc”). On ne sait pas exactement pourquoi elle l’a remplacé par “Dean” (qui signifie “vallée” ou peut-être “homme”), mais ce que ces deux prénoms ont en commun est qu’ils sont tous les deux extrêmement populaires chez les britanniques de la classe ouvrière. “Thomas”, qui signifie littéralement “fils du jumeau”, est un nom britannique très banal. De plus, la patrie de l’équipe de football West Ham est le East End de Londres, exactement là où on s’attend à trouver les nouveaux immigrés, les minorités ethniques, et d’autres groupes de gens pauvres – beaucoup d’entre eux, malheureusement, vivant dans des taudis. Ca a dû être extraordinairement difficile pour la mère de Dean de vivre ici en tant que femme seule ; et après qu’elle se fut remariée, elle a dû connaître tous les soucis d’une famille recomposée.

En un mot, le milieu familial de Dean est singulièrement peu passionnant ! Malgré tout il est en fait présenté comme un garçon remarquable. Il soutient qu’il est sûr d’avoir raison, même quand son meilleur ami essaye de l’en dissuader ; il se tait sagement quand il le faut, il est gai et ne se plaint jamais de sa pauvreté ; il a réussi à développer ses talents artistiques.

Il n’est pas surprenant que Dean s’entende bien avec Seamus Finnigan. Seamus est aussi quelqu’un de joyeux, d’ouvert – peut-être au début moins courageux que Dean, mais quand même assez pour admettre quand il se trompe. Et Seamus est probablement un garçon de la classe ouvrière lui aussi. Bien que l’Irlande soit maintenant un pays riche, jusqu’à aussi récemment qu’en 1990 être irlandais sous-entendait être pauvre. Seamus dit que ça a fait “un sacré choc” à son père moldu quand il a su que sa femme était une sorcière. On ne nous dit pas si les parents de Seamus vivent toujours ensemble, mais seule sa mère est mentionnée à la Coupe du Monde de Quidditch, et seule sa mère a une opinion à propos de si Seamus doit retourner à Poudlard pour sa cinquième année. Si cela implique une rupture familiale, personne ne peut comprendre Seamus mieux que Dean.

Le principal point à propos des origines de Seamus est qu’il est irlandais. “Seamus”, un prénom irlandais très courant, est la forme gaëlique de “Jacob”, qui signifie littéralement “talon”, mais avec des sous-entendus d'”usurpateur”. Dans la Bible, Jacob est né agrippé au talon de son frère jumeau, et a passé son enfance à essayer d’usurper les droits de son frère par la tricherie. “Finnigan”, qui signifie “blond”, est un nom irlandais courant, qu’on trouve le plus souvent dans la région de Galway-Roscommon. Ainsi Seamus vit probablement au coeur de la lande de tourbière au milieu des collines fertiles et des lacs du Connacht (Irelande de l’ouest), où les anciens parlent encore le gaëlique dans des fermes construites en chaume et en tourbe, et où les farfadets cachent encore de l’or au bout des arcs-en-ciel. Seamus doit vivre dans une maison en pierre et parler seulement un rudiment de gaëlique, mais il doit monter un poney du Connemara aussi aisément qu’un balai, et sa mère doit encore faire bouillir son chaudron sur un feu de tourbe. En honneur à Saint Patrick, j’espère que JKR donnera à Seamus le 17 mars comme jour d’anniversaire.

Les glousseuses : Lavande, Parvati et Padma

Dans la multiculturelle Birmingham les épices indiennes peuvent être achetées au supermarché du coin et les cours de danse indienne traditionnelle se trouvent tous les deux pas. Le nom “Patil” (habituellement écrit “Patel”) signifie “chef”, et ça nous apprend que la famille de Parvati et Padma Patil était originellement du nord de l’Inde. Cela inspire aussi quelque chose de la grande dame (Ndt : je suppose que c’est un surnom de l’Inde pour les anglais) dans la façon dont les jumelles approchent la vie. Leurs parents et grand-parents ont dû être des nouveaux immigrés dans les années 60, mais les filles ont dû naître en Grande-Bretagne, et doivent probablement mieux parler l’anglais que l’hindi.

Au départ JKR voulait donner aux soeurs Patil des prénoms commençant par M, mais la modification tombait bien, puisque Parvati et Padma sont les noms de déesses hindoues qui étaient soeurs jumelles. “Padma” signifie littéralement “lotus” ; dans le bouddhisme le lotus est un symbole de vérité et d’égalité entre toutes les choses vivantes. La Padma d’origine, une déesse de la rivière, était la patronne de la connaissance, ce n’est donc pas surprenant que Padma ait été répartie à Serdaigle.

“Parvati” signifie “fille de la montagne” – son équivalent hébreu serait “Magdalene”. Dans la mythologie hindoue Parvati tombe amoureuse de Shiva et, accablée de douleur devant son indifférence, elle court aux montagnes pour se cacher. Shiva la trouve sous un déguisement, lui extorque sa déclaration d’amour, révèle qui il est, et l’épouse. Puisque Shiva est le dieu de la mort, Parvati est celle qui “courtise la mort” – ce qui est peut-être un intéressant présage de son éventuel rôle dans l’action de Harry Potter.

Lavande Brown a quelque chose qui tient du mystère. “Lavande”, l’un des nombreux noms de fleurs de JKR, est un prénom très peu courant, et déjà ce choix insolite nous laisse une énigme insoluble – d’autant plus que Lavande semble être d’ascendance moldue. (Elle est classée comme sang-pur dans la liste d’élèves, mais, comme Harry et Dean, elle semble toujours perplexe quand les points les plus subtils du monde magique sont évoqués.) La lavande est une plante douce et résistante qui a beaucoup de propriétés curatives, mais qui est aussi jugée peu fiable parce que les buissons de lavande étaient les cachettes favorites des serpents. On ne sait pas encore si Lavande Brown va “cacher un serpent”, peut-être involontairement, ou bien “soigner”. Dans le langage des fleurs, la lavande a valeur de “négation” et exprime le message “je t’aime bien mais pas d’amour”.

Lavande est la seule élève qui n’offre aucun indice sur l’endroit où elle habite. Comme “Brown” est un nom très, très courant – il signifie littéralement “quelqu’un qui a le teint bronzé” – il peut être trouvé n’importe où dans les îles britanniques. On ne peut même pas affirmer que le fait que son lapin soit tué par un renard signifie qu’elle habite en milieu rural : les renards urbains sont un fléau reconnu dans chaque ville de Grande-Bretagne. Toutefois, en procédant par élimination (tous les autres élèves de la liste peuvent être placés), il semble que Lavande soit l’élève qui vient du Sussex. Peut-être habite-t-elle dans une ville côtière comme la sophistiquée Brighton ou l’ensoleillée Eastbourne. Dans ce cas, ses parents travailleraient dans le tourisme, peut-être en tenant un petit hôtel. Mais le Sussex a aussi des villes à l’intérieur des terres : l’historique Chichester, avec son château et sa cathédrale et son festival de théâtre annuel, et l’organisée Nouvelle Ville de Crawley. Autrement, Lavande pourrait vivre au nord de Londres, peut-être à Saint Albans, dans le Hertfordshire. Dans ce cas ses parents sont peut-être leurs propres patrons dans une petite entreprise.

Dans PA/f, Lavande est incarnée par une actrice noire, mais il n’est pas évident que ce soit en accord avec JKR. Les fans perçoivent traditionnellement Lavande comme une blonde, mais probablement seulement parce que ça crée un contraste visuel avec son amie Parvati.

Lavande, Parvati et Padma ont parfois été représentées comme des filles frivoles, hyper-féminines, en contraste avec Hermione le rat de bibliothèque. C’est vrai que Parvati et Lavande croient en la divination et aiment glousser à propos des garçons, que Parvati et Padma sont excessivement préoccupées par le prestige social, et que toutes les trois adorent la mode. Mais c’est superficiel. Padma est considérée comme suffisament responsable pour être nommée préfète. Parvati et Lavande se soucient assez du Professeur Trelawney pour lui apporter des fleurs lorsqu’elle fut renvoyée. Lavande aime les animaux, et elle fait partie de ceux qui aident Hagrid à rattraper les Scroutts à pétard quand presque toute la classe s’enfuit. Et toutes les trois ont été prêtes à risquer leurs relations. Parvati semble avoir tourné le dos à une “copine” lors de sa deuxième semaine à Poudlard, quand elle soutient Neville pendant leur premier cours de vol sur balai quand Pansy Parkinson l’embête. La façon dont Pansy s’addresse à Parvati lors de cet incident suggère qu’elles se connaissent depuis un bon moment, ce qui suggère à son tour que les Patil sont des sang-purs, puisque autrement Pansy ne lui aurait pas répondu.

Lavande va au bal de Noël avec Seamus, mais elle assiste aux réunions de l’A.D. sans lui. On ne sait pas s’ils ont eu une liaison sérieuse, mais ils sont certainement amis ; malgré tout Lavande cherche suffisament à bien faire pour se séparer de Seamus. Quand Padma rejoint l’A.D., elle n’amène aucune amie avec elle. Il y a deux interprétations possibles. L’une est que Padma n’a pas d’amie proche – peut-être qu’elle est discrète, et qu’elle est l’exception dans son dortoir de cinq filles. Mais une autre possibilité est que l’amie (ou les amies) ait décliné l’invitation de l’A.D. En apportant son soutien à Harry Potter, Padma a peut-être perdu une amitié importante.

Le trio de Serdaigle : Michael, Anthony et Terry

Le nom “Corner”, indiquant quelqu’un qui habite dans le “virage” d’un terrain, est un nom de Durham. Même à Durham, cependant, ce nom n’est pas particulièrement courant, ce qui suggère qu’il a été délibérément attribué à un personnage dans un but précis. Michael Corner est là pour aider Ginny à prendre un “virage” dans sa vie – elle va renoncer à l’inaccessible Harry Potter et rencontrer d’autres garçons. Lorsqu’ils rompent, Michael se lie avec l’éplorée Cho Chang, et lui offre aussi l’espoir de prendre un “virage” difficile. Michael est un prénom hébreu, qui signifie littéralement “qui est comme Dieu”. Dans la Bible, Michael est l’archange qui défend les droits des gens élus par Dieu. Il y a quelque chose du guerrier vertueux chez Michael Corner, un membre loyal de l’Armée de Dumbledore, aussi bien que le champion répondant aux besoins des filles au coeur brisé.

Quand le Poudlard Express emmène Michael à la fin de sa cinquième année, il est si attaché à Cho qu’il quitte ses amis pour sa compagnie. Pourtant, il était au début – et peut-être l’est-il encore – très proche de Anthony Goldstein et Terry Boot. Quand Ginny vient parler à Michael de l’A.D., ça ne le dérange pas que ses amis écoutent cette conversation à-demi privée avec sa petite amie ; et c’est évident qu’ils partagent les mêmes valeurs, puisque Anthony et Terry décident immédiatement qu’ils vont eux aussi joindre l’A.D.

On est sûrs de trouver Anthony Goldstein parmi les rebelles. Il est probablement nommé d’après Emmanuel Goldstein, le meneur de la résistance dans le roman “1984” de George Orwell. Orwell a lui-même probablement pris modèle sur Léon Trotsky, le socialiste qui s’est rebellé contre Staline. “Goldstein”, qui signifie littéralement “pierre dorée”, est un nom du genre de ceux qu’on trouve parmi les juifs d’Europe de l’Est. Seulement 0.5% de la population britannique est juive, et ils sont une minorité appréciée ; le stéréotype populaire les présente comme de bons citoyens qui ont des coutumes pittoresques. Cependant, Anthony est probablement plus un traditionnel plutôt qu’un juif orthodoxe, puisque son prénom n’est pas hébreu, mais latin. Il signifie “le plus excellent” ; Anthony est en effet quelqu’un d'”excellent”, suffisament responsable pour être nommé préfet, mais ce choix de prénom n’est probablement rien de plus qu’un exemple des fois où JKR donne à un personnage secondaire un prénom courant et typiquement britannique.

Les Goldstein britanniques vivent principalement à Londres ; notre plus grande communauté juive se situe dans un faubourg confortable du nord de Londres appelé Golders Green. Ici Anthony peut profiter de la grande synagogue et d’excellents commerces – en fait, c’est presque sûr que ses parents tiennent un magasin. Il habite à seulement quelques kilomètres de chez Dean Thomas, mais il y a un énorme contraste dans leurs styles de vie.

Terry Boot s’appelait à l’origine “Trevor” (qui signifie “maison près de la mer”). “Trevor” était un prénom courant à la génération précédente, mais il est légèrement passé de mode chez les enfants nés en 1980 ; JKR a finalement décidé de donner ce nom au crapaud de Neville. “Terry” est un prénom latin qui signifie “tendre” ; difficile de trouver plus de signification à ce prénom modérément populaire, mais il semble plus raffiné que “Trevor”. “Boot” est un nom du Nottinghamshire inspiré d’une profession, indiquant un “fabriquant de chaussure” – une personne utile qui fait un travail honnête. En fait “Boot” n’est pas un nom particulièrement courant ; peut-être qu’il a une signification personnelle pour JKR.

Pour le lecteur britannique moyen, cependant, ce qui vient immédiatement à l’esprit est Boots, la chaîne de pharmacies. Si Terry Boot est censé être un descendant métaphorique de Jesse Boot le pharmacien, alors on en sait vraiment beaucoup sur lui. Premièrement, il vit à Nottingham ; Terry est un citadin. Deuxièmement, il doit être d’une famille bourgeoise. Troisièmement, il doit être un négocieur habile, mais, quatrièmement, il doit avoir une forte inclination pour l’honnêteté et la justice sociale. (Jesse Boot mena involontairement tous ses concurrents à la faillite parce qu’il ne vendait que des produits de la meilleure qualité, il les acquérait à bas prix en les achetant en gros, et ensuite les vendait au plus petit profit qu’il pouvait se permettre parce qu’il pensait que les pauvres aussi méritaient d’avoir accès aux médicaments les plus indispensables. Voilà pourquoi Boots est aujourd’hui le premier pharmacien en Grande-Bretagne.) Cinquièmement, Terry doit être un chrétien évangélique – c’était la force spirituelle qui était à la base des entreprises commerciales de Jesse Boot. Sixièmement, puisqu’il est d’ascendance moldue, il doit connaître les produits pharmaceutiques – imaginez à quel point il doit avoir une autre vision des cours de potions du professeur Rogue ! Septièmement, il doit approcher la vie avec une certaine fibre artistique (Boots vend des savons et des parfums aussi bien que des médicaments) ; Terry est exactement le genre de personne qui doit avoir pour passe-temps de jouer du violon, peindre des aquarelles, ou faire des recherches sur l’histoire locale – par exemple, il pourrait être un spécialiste de Robin des Bois.

J’ai dit que Terry est un chrétien, aussi est-il intéressant que son meilleur ami soit Anthony le juif. Les Serdaigle aiment débattre longuement de choses abstraites ; il semble que ce qui a noué l’amitié entre Terry et Anthony est un intérêt partagé pour le Sens de la Vie. Leurs convictions spirituelles leur donnent assez de choses en commun, autant que de différences, pour tout dire.

Cela nous apprend aussi quelque chose de nouveau sur Michael Corner. Il n’est pas obligé de passer son temps avec Terry et Anthony, puisqu’il y a probablement deux autres garçons de Serdaigle avec qui il pourrait être ami. S’il préfère Terry et Anthony, cela suggère que Michael aussi apprécie une discussion philosophique. Alors qu’il est presque un agnostique, il admet apparement que certaines Grandes Questions sont importantes à poser. On peut imaginer notre trio de Serdaigle toujours en train de chercher de nouvelles questions et ensuite de débattre des réponses, peut-être avec une Bible ouverte devant eux.

Les autres Serdaigle : Mandy, Kevin, Su, Morag et Lisa

Lors de la cérémonie de Répartition de ES, on voit trois filles attribuées à Serdaigle : Mandy Brocklehurst, Morag MacDougal et Lisa Turpin. Aucun de ces personnages n’est évoqué à nouveau dans le canon. La liste d’élèves donne aussi le nom de deux autres Serdaigle, Kevin Entwhistle et Su Li, qui ne sont même pas mentionnés dans le canon. A première vue, on se demande s’ils sont vraiment des personnages à part entière – qu’est-ce qu’on sait d’eux ? La réponse est : pas mal de choses !

“Mandy”, le diminutif de “Amanda”, est encore un autre prénom britannique courant. C’est du latin et ça signifie “aimable”. “Brocklehurst” est un nom du nord des Midlands ; il signifie littéralement “terrier de blaireau dans un verger”, ce qui a l’air très agréable. Cependant, dans “Jane Eyre” de Charlotte Brontë, il y a un révérend épouvantablement critique et strict qui s’appelle M. Brocklehurst, alors peut-être que la douce Mandy a une tendance sévère. Par élimination, Mandy vit dans le Staffordshire, peut-être à Lichfield ou Stoke-on-Trent.

Morag MacDougal bénéficie d’une grande attention de la part de sa créatrice, pour un personnage qui ne prend aucune part à l’action, car JKR a changé d’avis trois fois à propos du prénom de cette fille. Sa première idée était “Katrina”, un diminutif de “Katharine”, mais ça a été rayé et remplacé par “Isabel”, un diminutif de “Elizabeth”. Encore plus tard, elle devint “Morag”. Ces trois prénoms ont en commun d’être tous écossais – et Morag MacDougal est l’écossaise par excellence.

Les MacDougals d’origine étaient des Vikings qui au douzième siècle ont taillé leur chemin dans l’Argyllshire et les Hébrides sous la devise ‘Conquérir ou mourir’, puis ils se sont mariés avec les autochtones aux cheveux roux et parlant gaëlique. Si Morag est restée à proximité de la patrie de ses ancêtres, elle vit dans les Highlands reculées, peut-être dans la région du kelpy du Loch Ness, et elle soutient l’équipe de Quidditch de Pride of Portree (Ndt : la Fierté de Portree (QA)). On peut la décrire comme une fille petite, aux yeux bleus, avec des taches de rousseur et des reflets roux dans ses cheveux bruns. La signification littérale de “Morag” est “le soleil”, tandis que “MacDougal” signifie “fils de l’étranger sombre”. C’est signe que ce personnage est pris entre les ombres de l’obscurité et la lumière. C’est une sang-pur, elle n’a pas été répartie à Serpentard, mais elle est absente de l’Armée de Dumbledore : elle n’a pas encore décidé de quel côté elle veut être.

Lisa Turpin aussi a des ancêtres Vikings, puisque “Turpin” signifie “le Finn de Thor” – une “personne de Finlande qui est sous la protection du dieu du tonnerre Thor”. On pense immédiatement au bandit de grand chemin, Dick Turpin (1706-1739), ce qui sous-entend que Lisa est une hors-la-loi et une voleuse ! C’est plutôt en contradiction avec “Lisa”, qui est un prénom britannique très courant ; c’est un diminutif du prénom hébreu “Elizabeth”, qui siginifie quelque chose comme “serment de Dieu”. Donc c’est un autre personnage qui n’est pas encore décidé. Lisa doit être grande et blonde, et son nom la situe dans le Yorkshire. Donnons-lui un endroit à l’influence Viking flagrante, comme le port de pêche de Whitby, qui se targue d’un musée Dracula, ou Thornaby-on-Tees – ou bien York même.

Su Li a un prénom plutôt fade qui n’indique vraiment que son origine chinoise. “Su” est un prénom chinois courant qui signifie “pur”, donc en gros c’est l’équivalent de “Katharine”. “Li” est l’un des noms chinois les plus courants et on dit qu’il signifie “prunier”. Ce personnage a dû être le prototype de Cho Chang, ensuite abandonné une fois que JKR a décidé de mettre sa fille glamour et inaccessible dans la promotion au-dessus de celle de Harry.

En admettant que le personnage de Su existe encore, on sait qu’elle est une sang-mêlé et chinoise du point de vue ethnique. La communauté chinoise en Grande-Bretagne est peu nombreuse (environ 0.5% de la population), bien intégrée et appréciée. Les grand-parents de Su ont dû arriver en Grande-Bretagne vers 1960 et ouvrir des restaurants chinois à Londres (les grand-parents moldus dans un quartier comme Southwark, les sorciers sur le Chemin de Traverse). Les parents de Su ont dû hériter du restaurant, mais ils doivent mieux parler l’anglais. Comme une famille sorcière qui parle bien anglais doit préférer la compagnie des sorciers anglo-saxons à celle des moldus chinois, Su ne doit pas s’identifier beaucoup à la communauté chinoise ; elle doit probablement parler un peu de chinois mais préfèrer l’anglais.

“Kevin”, qui signifie “bel oiseau”, est au départ un prénom irlandais, et Saint Kevin, un saint patron de Dublin, était un protecteur des animaux. Cependant, notre bel amoureux des animaux ne vit pas en Irlande (bien qu’il tienne peut-être son prénom d’une mère née irlandaise), car le nom “Entwhistle” se trouve exclusivement dans le Lancashire. Le village de Entwistle, qui signifie littéralement “terrain à l’embouchure de la rivière où vivent les poules d’eau”, est juste au nord de Manchester, donc cherchons Kevin quelque part dans les communes de la banlieue de Manchester. Puisqu’il est d’ascendance moldue, Kevin ne doit pas être au courant que ses plus proches voisins sorciers sont Pansy Parkinson, Neville Londubat et le mystérieux Runcorn.

Le trio de Poufsouffle : Justin, Ernie et Hannah

Justin Finch-Fletchley propose son amitié à Harry Potter lors de la première semaine de leur deuxième année, mais il faudra trois autres années pour que cette amitié mûrisse. En quelques mots, nous avons un petit portrait de Justin : pour l’essentiel, il est un aristocrate de la société moldue, un vrai gentleman anglais, pour qui les bonnes manières sont aussi naturelles que de respirer. Ses parents sont probablement un “Sir” et une “Lady”, et ils possèdent presque certainement un domaine – disons dans le Northamptonshire, dont les châteaux et les clochers, les collines verdoyantes et les rivières au cours rapide, sont à quelques heures (en Rolls Royce) de Londres. Aller à Poudlard doit faire rater à Justin la plupart des évènements de la communauté locale : le Rothwell Fair et le Crick Boat Show tombent au moment de ses examens de fin d’année, tandis que le Grand Prix de Grande-Bretagne se déroule à la fin de l’automne. Mais le Festival de Ballon de Northampton doit rester un grand moment de ses vacances d’été.

Justin était censé aller à Eton, le pensionnat aristocratique suprême – il y aurait été deux ans avant le Prince William. Quand il persuade ses parents de le laisser aller à Poudlard à la place, il sait qu’il va entrer dans un monde dans lequel ses relations aristocratiques n’auront aucune valeur. En effet, les Malefoy, les prétendus aristocrates du monde magique, vont mépriser ses ancêtres moldus, et même essayer de le tuer. Pourtant, Justin ne demande pas de traitement spécial. Alors que Drago est tout le temps en train de se vanter de ses relations riches et importantes, Justin ne parle jamais d’argent. Non seulement c’est vulgaire de parler de l’argent de quelqu’un, mais l’argent n’est pas un sujet qui occupe l’esprit de Justin, parce qu’il ne croit vraiment pas qu’avoir une fortune ancienne le rend quelqu’un de plus important que quelqu’un qui a une richesse récente ou moins que ça.

Les pronostics pour Justin ne sont pas très bons. “Justin” est un prénom latin, qui indique la “justice” du caractère de cette personne. Cependant, j’ai comme une vague impression qu’il est prénommé d’après le martyr Saint Justin (vers 100-165 après J.C.), un gentilhomme très courtois qui a été assassiné pour avoir refusé d’abandonner ses convictions. Le but du nom “Finch-Fletchley” doit simplement être de lui faire porter un nom de famille composé, ce qui est un signe d’ascendance aristocrate. Cependant, un “finch” (Ndt : “passereau”) est un petit oiseau, alors que “Fletchley” (que je n’ai réussi à trouver sur aucune liste de noms existant réellement) signifie littéralement un “champ de pointes de flèches”. Voilà qui suggère une personne vulnérable qui aura une mort violente.

Ernie Macmillan est le meilleur ami de Justin. Par certains côtés, ils forment une paire insolite. Ernie, avec ses neuf générations de sang-purs, jouit de la reconnaissance des mêmes sorciers pleins de préjugés qui traitent Justin de “sang-de-bourbe”. A l’inverse, Ernie est vraiment un garçon de la bourgeoisie ; par rapport à Justin, ses manières sont maladroites, et il a souvent l’air pompeux. Le fait qu’ils se soient choisis l’un l’autre pour amis – et qu’ils aient choisis d’être amis avec Hannah Abbott, une fille de la classe bourgeoise d’ascendance moldue – est une preuve indéniable que ni l’un ni l’autre n’est snob.

“Macmillan” signifie littéralement “fils de l’homme tonsuré”, cet homme étant l’Evèque Cormac de Dunkeld, l’arrière-arrière petit-fils du roi d’Ecosse Macbeth. Les Macmillan ont des ancêtres gaëliques et pictes. JKR nous dit que Ernie est “corpulent”, ce qui signifie qu’il a la carrure large typiquement gaëlique, et probablement aussi le gros nez. Peut-être qu’il a la peau pâle et les yeux gris des pictes, tandis que ses cheveux sont peut-être d’une couleur entre le roux et le brun. Au départ le clan vient de l’Ecosse centrale, mais il s’est étendu vers l’ouest et vers le sud jusque dans l’Ayrshire, ce qui suggère que Ernie habite à Glasgow. Le clan Macmillan, descendant à la fois de la royauté écossaise et de l’Eglise Celtique, a pour devise : “Je m’exerce à secourir les malheureux”, ce qui est approprié pour une famille qui a toujours soutenu les gens comme Dumbledore.

JKR a dû choisir le prénom “Ernie” avec beaucoup d’affection, car c’était le prénom de son grand-père paternel. Ernie est certainement quelqu’un de “grave” (Ndt : jeu de mot avec Ernie : le mot de la v.o. est “earnest”) : très sérieux – c’est difficile de l’imaginer faire une blague – et très sincère, bien qu’il n’ait pas toujours raison. Deux terribles malentendus gâchent les premiers rapports d’Ernie avec Harry Potter. D’abord, il y a le soupçon fantaisiste selon lequel Harry est le diabolique héritier de Serpentard ; plus tard, il y a la croyance plus compréhensible que Harry est un frimeur qui a triché dans le Tournoi des Trois Sorciers. Si on ajoute à cela le fait que Harry et Ron font moins de tentatives d’amitié envers Justin et Ernie que les Poufsouffle n’en font envers eux, ce n’est pas surprenant qu’ils ne deviennent pas vraiment amis avant leur cinquième année. A ce moment-là, Ernie a dû s’excuser auprès de Harry pour la troisième fois ; quand Harry est une fois de plus la cible de rumeurs malveillantes, Ernie semble déterminé à ne pas s’y laisser prendre une troisième fois.

Hannah Abbott n’est pas quelqu’un qu’on dupe. D’une nature douce et perspicace, elle sait que Harry ne peut pas être mauvais ; mais elle trop ultra-sensible pour avoir confiance en son propre jugement contre l’opinon contraire de Justin et Ernie, qui sont des gens sûrs d’eux. Il n’y a rien d’ambigü chez Hannah – elle est un personnage indubitablement “bon”. Un “abbot” (Ndt : “abbé”) est un guide spirituel, tandis que “Hannah”, qui signifie “grâce”, est la forme originale en hébreu de “Anne”, le prénom de la mère de JKR. Le nom “Abbott” est prédominant dans le nord de l’Angleterre, donc Hannah est notre candidate la plus probable pour le glorieux Lake District aux environs de Cumbria.

Les défenseurs : Susan et Zacharias

Susan Bones est inscrite comme une sang-mêlée, ce qui suggère que sa mère était d’ascendance moldue, puisque les Bones sont une vieille famille de sorciers. Leur nom prédomine dans l’Essex, alors peut-être qu’ils habitent à Chelmsford. Le nom “Bones” sous-entend à l’origine une personne “mince”, mais dans ce cas ça suggère littéralement un “squelette”, puisque Voldemort a déjà assassiné au moins sept membres de la famille Bones. Susan elle-même pourrait être la prochaine cible, puisque “Susan”, un prénom hébreu, signifie “lily” (Ndt : “lys”), une fleur associée à la pureté et à la mort.

Le nom de Zacharias Smith est presque invisible sur la liste d’élèves, mais nous savons par le canon qu’il est à Poufsouffle. JKR a d’abord pensé l’appeler “Siddons”, ce qui signifie “fermier”, mais elle avait apparement décidé que les connotations de ce nom n’étaient pas assez fortes pour justifier de le garder lorsqu’elle se rendit compte qu’elle n’avait pas de “Smith”. La promotion devait compter un Smith, puisque “Smith” est le nom le plus courant en Grande-Bretagne, littéralement un “forgeron” ou “ferronnier”. Bien que le nom “Smith” puisse être trouvé n’importe où en Grande-Bretagne, il est particulièrement courant en Ecosse. A défaut de meilleurs indices, disons que Zacharias vit dans les Lowlands, dans une ville comme Melrose, Peebles ou Hamilton.

Le “Smith” ironiquement banal au possible jure avec un prénom excentrique comme “Zacharias”, un prénom hébreu qui signifie “le Seigneur s’est souvenu”. Dans la Bible, Zacharias était un sceptique qui n’a pas cru le message d’un ange ; l’ange réagit en le rendant sourd pour neuf mois. Zacharias Smith est certainement un sceptique, et il est momentanément abasourdi quand Ron lui dit de se taire. Vous vous souvenez qu’on a dit que nous devrions trouver un sceptique en Ecosse ? Zacharias a l’air d’être celui-là.

Les autres Poufsouffle : Stephen, Wayne et Megan

Wayne Hopkins et Megan Jones n’ont pas encore intégré le canon narratif, mais on peut tout de suite voir qu’ils ont quelque chose en commun : ils sont tous les deux gallois.

“Wayne”, qui signifie “fabricant de wagons”, suggère un homme de la classe ouvrière qui travaille honnêtement de ses mains ; c’est encore un autre exemple de prénom britannique courant donné à un personnage secondaire. Et Wayne est effectivement un garçon de la classe ouvrière, puisque le nom “Hopkins”, qui signifie simplement “fils de Robert”, se trouve plus souvent dans le Glamorgan (sud du Pays de Galles) que n’importe où ailleurs en Grande-Bretagne. Le Glamorgan est une région fortement industrialisée. Cherchons la famille Hopkins dans des villes telles que Merthyr Tydfil (specialisée dans l’aviation et les aspirateurs), Port Talbot (acier et produits chimiques) ou Maesteg (petite mécanique et cosmétiques) – mais gardons à l’esprit que les parents de Wayne n’ont peut-être pas de travail du tout, car toute la région connaît une crise économique due à la chute de sa principale industrie, le charbon. On s’attend à trouver deux camarades de Harry qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté, et Wayne est est un principal candidat pour être l’un d’eux.

Il est possible que JKR ait nommé Wayne d’après le poète, Wil Hopcyn (vers 1720), qui était aussi du Glamorgan et était aussi un garçon de la classe ouvrière. Cet ouvrier agricole illettré a transformé sa tragédie personnelle en une chanson d’amour déchirante, Watching the White Wheat (Ndt : approximativement, “En regardant le blé blanc”), qui reste l’une des chansons folk les plus appréciées du Pays de Galles. Alors peut-être que Wayne Hopkins aussi brûle d’avoir une vie plus inspirante – de musique, de poésie, d’amitié ou de magie ? Espérons qu’il les trouve à Poudlard.

“Megan” est un dérivé de “Margaret”, un mot persan signifiant “lumière” qui est devenu le mot grec pour “perle”, qui est uns des prénoms traditionnels de Grande-Bretagne. “Megan” n’est pas un prénom gallois traditionnel, mais c’est une forme qui sonne gallois. Le nom “Jones” est maintenant extrêmement courant dans toute la Grande-Bretagne, mais c’était au départ la forme galloise de “fils de John”. “John”, bien sûr, est un prénom hébreu qui signifie “le Seigneur est gracieux”. Le message ici est que cette fille est galloise !

Megan doit être du nord du Pays de Galles, ce qui rend sa famille plus traditionnellement Galloise que celle de Wayne – elle possède certainement une tenue complète du costume traditionnel, même si elle le porte seulement pour les fêtes. Disons qu’elle habite dans la Vallée de Clwyd, au milieu des fermes laitières et des châteaux médiévaux, non loin du International Eisteddfod annuel ou des montagnes à couper le souffle de Snowdonia. Dans ce cas elle parle gallois à la maison, et on lui parlait en gallois à l’école moldue ; elle doit avoir appris l’anglais comme seconde langue de la même façon que les autres enfants britanniques apprennent le français.

L’équipe de Quidditch locale de Megan est l’équipe exclusivement féminine des Harpies de Holyhead. Il est intéressant de noter que la capitaine de cette équipe s’appelle Gwenog Jones. Bien qu’on doive faire attention à ne pas interpréter trop de choses dans la répétition de noms très courants, il est possible que Megan soit une soeur, une cousine ou une nièce de la Gwenog réputée agressive, qui a environ une douzaine d’années de plus qu’elle. (La canon mentionne aussi une Hestia Jones, une membre de l’Ordre du Phénix – mais “Hestia” est le nom d’une déesse grecque, alors elle est moins susceptible d’être apparentée à Megan). Si le tempérament de Megan est aussi fougueux que celui de Gwenog, peut-être est-elle bien ennuyée que Wayne Hopkins soit si anglicisé, ce qui doit lui paraître comme une trahison envers son héritage gallois. On peut s’attendre à un conflit entre ces deux camarades de classe à moins que Megan devienne assez mature pour se rendre compte que la meilleure chance de préserver le Pays de Galles est que les gallois soient solidaires. Cambria pour toujours !

Stephen Cornfoot habite loin de Wayne et de Megan, car le nom “Cornfoot” se trouve dans l’est de l’Ecosse – il vit presque sûrement à Edimbourg. Cependant, ces trois élèves doivent être du même type racial, car ils descendent tous des Celtes (ou des Pictes), qui sont les plus anciens occupants restants de la Grande-Bretagne. Vous pouvez les imaginer comme étant de taille moyenne, avec de hautes pommettes et un nez droit, un teint très pâle, des cheveux bruns et des yeux gris.

“Stephen” vient du mot grec pour “couronne” et en Grande-Bretagne, ce prénom est populaire à la nausée. Cependant, il faut se souvenir que Saint Stephen fut le premier chrétien à mourir pour sa foi. “Cornfoot”, par contraste, est un nom très peu courant ; JKR a probablement nommé ce personnage d’après Janet Cornfoot, une villageoise de l’est de l’Ecosse qui fut accusée de sorcellerie en 1704. Bien que le tribunal l’acquittât (à cette époque les gens instruits ne croyaient plus aux sorcières), la foule en colère la pourchassa et la piétina à mort. En dépit de son sang pur, il semble que Stephen Cornfoot est condamné, et que sa “couronne” sera du type de celles décernées aux martyrs.

Il est étonnant que les Poufsouffle, réputés pour leur esprit d’équipe et leur solidarité, soient fans d’autant d’équipes de Quidditch différentes. Nous avons remarqué la probable affiliation de Megan avec les Harpies de Holyhead. Wayne doit soutenir les Catapultes de Caerphilly (au cas où vous l’auriez oublié, leurs couleurs dérivent du drapeau gallois), Stephen les prodigieusement bonnes Pies de Montrose, Zacharias les Vagabonds de Wigtown, Ernie les Fierté de Portree et Sally-Anne les Tornades de Tutshill. En supposant que ceux qui sont d’ascendance moldue n’ont pas saisi l’importance du Quidditch, seule Susan Bones n’a pas d’équipe locale flagrante. Le Quidditch peut aussi bien être joué violemment que donner lieu à des discussions violentes, ce doit être une question délicate pour ces Poufsouffle.

Les voyous : Drago, Vincent et Gregory

JKR pensait qu’elle avait elle-même inventé le nom “Malfoy” (Ndt : “Malefoy” dans les versions françaises), mais il existait vraiment une famille Malfoy vivant dans le Kentucky en 1920. Certains se demandent comment un nom aussi peu attrayant ait été choisi pour leurs ancêtres, parce qu’il vient des mots français pour “mauvaise foi”. Il est pareillement douteux que n’importe quels parents britanniques de la vie réelle appellent leur enfant “Drago”, qui est le latin pour “dragon”. Alors quel effet JKR voulait-elle donner en inventant les mots “Drago Malfoy” ?

Premièrement, la complète incongruité du nom nous apprend que c’est une famille qui est totalement isolée de la société moldue courante. Ils ont leur propres traditions et ils ne se préoccupent tout simplement pas de ce qui est culturellement “normal” ailleurs. Deuxièmement, le “dragon” est un animal angereux, associé aux monstrueux serpents venimeux et destructeurs, et à tout le symbolisme du Diable. Il y a eu un dirigeant d’Athènes brutal et cruel qui s’appelait Drago, ce qui a donné le mot “Dragonien”. Troisièmement, on ne peut pas faire confiance à ces gens qui ont “mauvaise foi”. Ils diront n’importe quoi qui fera l’affaire, ne sachant pas dire la vérité ou tenir une promesse.

Quatrièmement, l’utilisation du français suggère que la famille a des ancêtres normands. Trois cent Normands arrivèrent en Angleterre en 1066, massacrèrent les classes dirigeantes existantes, et prirent la tête du pays. Ils ne s’embêtèrent pas à apprendre la langue, les lois ou les coutumes anglaises, ils imposèrent simplement leur propre culture, qu’elle soit en accord ou pas, et ils ne se marièrent même pas avec la population locale. En vingt ans, ils avaient tué un sixième de la population native, tandis que seulement deux des propriétaires terriens anglo-saxons d’origine s’étaient débrouillés pour garder le contrôle de leurs terres héréditaires. Et cela est, bien sûr, exactement l’attitude des Malefoy envers les autres mortels. Ils existent pour être utiles aux Malefoy, et ceux qui ne correspondent pas à leur perception de la réalité ne peuvent pas être autorisés à rester en vie.

Une fois de plus, comparons l’attitude de Drago avec celle de Justin Finch-Fletchley, qui est aussi susceptibe d’avoir des ancêtres normands. Justin est toujours en train de chercher à combler le fossé entre la richesse et la pauvreté, entre la puissance et la faiblesse, entre les sang-purs et ceux d’ascendance moldue. Drago veut rendre le fossé plus grand.

Le manoir des Malefoy est dans le Wiltshire, non loin de Stonehenge – indubitablement un endroit à la magie très ancienne. L’équipe de Quidditch locale de la famille doit être les Frelons de Wimbourne, ce qui apporte une perspective intéressante sur leurs relations avec le manipulé Ludo Verpey.

Vincent Crabbe et Gregory Goyle n’ont pas de personnalités distinctes. Ils sont souvent nommés comme une entité, “crabbe and goyle” étant une contrepèterie de “grab and coil” (Ndt : qu’on pourrait traduire par “s’aggrippe et s’enroule”), le mouvement d’un serpent. “Vincent” est le latin pour “conquérant” et “Gregory” est le grec pour “gardien”, mais ces prénoms doivent être interprêtés dans un sens très restreint : Vincent va conquérir (violemment) tout ce qui se dresse sur le chemin de Drago, tandis que Gregory est son gardien et garde du corps.

“Crabbe” est en fait un vrai nom, indiquant quelqu’un qui habite près d’un “crab-apple tree” (Ndt : un pommier sauvage). Peut-être que c’est un jeu de mot avec l’humeur “crabby” (Ndt : grincheuse), ou une allusion au crustacé aux pinces puissantes. Le mot “crabbe” est nordique, ce qui suggère que la constitution solide de Vincent est héritée d’un certain ancêtre qui était un Viking Berserk. Les écoliers britanniques frissonnent encore au souvenir de ces pirates brutaux qui envahirent l’est de la Grande-Gretagne au neuvième siècle pour piller, brûler et assassiner. Ce qui est intéressant, cependant, c’est que le nom “Crabbe” ne se trouve pas dans une région nordique, mais au coeur du Wessex – dans le Somerset. Vincent doit être un natif désagréable d’une ville attractive comme Taunton, Wells ou Glastonbury ; mais la ville industrielle de Bridgewater correspondrait mieux à son temprérament.

Quand JKR a appelé “Goyle” le deuxième accolyte de Drago, elle pensait probablement à une affreuse “gargoyle” (Ndt : gargouille – une fontaine publique taillée en un visage monstrueux). Mais en réalité c’est un vrai nom, une déformation de l’irlandais “Mac an Goill”, qui signifie “fils de l’étranger”. Gregory Goyle est l’homme de l’Irlande du Nord, où il y a à l’évidence une communauté sorcière importante, puisqu’une toute petite ville comme Ballycastle peut avoir une équipe professionnelle de Quidditch. Gregory reste sûrement discret à propos de son attachement à l’équipe “vampire” (Ndt : l’équipe a pour nom complet les “Chauves-souris de Ballycastle”), puisqu’à la fois Drago et Vincent doivent préférer les Frelons. Ballycastle est probablement le lieu des entraînements de l’équipe plutôt que le domicile de tous les joueurs ; Gregory doit habiter dans une ville comme Derry.

Les filles de Serpentard de la bande de Pansy

Pansy Parkinson est clairement la meneuse dans sa bande de filles de Serpentard. Manquant apparemment d’intelligence comme de beauté, elle est néanmoins la fille à qui les Serpentard s’en remettent. La “pansy” (Ndt : pensée) est la fleur aussi connue sous le nom de “heartsease” (Ndt : accroche-coeur ?), et elle symbolise les “pensées”, ce qui en tout semble trop aimable pour le personnage. (Certains sens de l’argot pour “pansy” sont, bien sûr, moins aimables – mais ça reste difficile de voir comment ils correspondraient. [Ndt : la seule définition que j’ai trouvé en argot pour le mot “pansy” est “pédale”]) “Parkinson” est un nom banal qui signifie “fils de Peter”, “Peter” (Ndt : l’équivalent du “Pierre” français) étant un prénom grec signifiant “rocher”. Cette forme de ce nom est très courante dans le Lancashire. Donc Pansy Parkinson habite à Manchester, probablement dans une des banlieues les plus peuplées de cette grande ville cosmopolite. C’est une région où il y a eu un mélange total entre les Anglo-Saxons (blonds) et les Celtes (bruns), alors on ne sait pas si Pansy a les cheveux sombres ou clairs. On imaginerait, cependant, qu’elle est menue, parce que Drago Malefoy est petit, mais Pansy s’accroche à son bras d’une façon qui indique qu’il est plus grand qu’elle.

Millicent Bulstrode est la seule autre fille Serpentard dont on sait grand chose, et elle est susceptible d’être au niveau le plus bas de la hiérarchie sociale. Non seulement elle est laide et gauche, mais elle est une sang-mêlée. “Millicent” est un prénom germanique qui signifie “travail” et “force” – mais nous savons déjà que l’équivalent féminin de Crabbe et Goyle devrait être faite pour le travail qui demande un effort physique. Contrairement à Crabbe et Goyle, Millicent semble assez capable de réfléchir par elle-même, et elle lance l’attaque sans attendre les ordres de quelqu’un d’autre. Pour développer ce point, “Bulstrode” signifie “bull” (Ndt : taureau) et “stride” (Ndt : foulée, enjambée) : elle est têtue, elle est aussi forte qu’un taureau, elle peut enjamber un boeuf, elle fonce… c’est une véritable caricature de la femme énergique, efficace, et peu aimable. Il y a un M. Bulstrode dans le Middlemarch de George Eliot, un banquier manipulateur, prétentieux. Le nom “Bulstrode” est du Buckinghamshire. Si Millicent habite dans la ville campagnarde d’Aylesbury, sa famille est riche et son style de vie est aisé.

Daphné Greengrass compte seulement une brève mention dans le canon, mais elle doit être une membre éminente de la bande de Pansy. Le prénom “Daphné” signifie “laurier”, qui est un symbole de victoire. Dans la mythologie grecque, Daphnée était une nymphe qui se transforma en buisson de laurier pendant qu’elle fuyait le dieu amoureux Apollon. La liste d’élèves nous montre que JKR l’avait d’abord appelée “Queenie” (faisons comme si c’était maintenant son deuxième prénom), ce qui suggère la royauté ou la majesté. Somme toute, Miss Greengrass a l’air d’être une fille tout à fait capable de s’occuper d’elle-même. Le prénom “Queenie” a une autre connotation, puisqu’il vient au départ d’un mot de vieil anglais pour “compagne”. Pansy doit certainement considérer Daphné comme une compagne acceptable companion, puisqu’elle est une sang-pur (contrairement à Millicent et Tracey). Donc il semble qu’elles deux ont négocié une relation d’intérêt, consistant probablement en ce que Pansy ira toujours en premier si elle laisse Daphné aller toujours en deuxième. Si Daphné fait attention à ne pas défier trop souvent sa meneuse de bande, elle doit être considérée comme la meilleure amie de Pansy.

Le nom “Greengrass” – évoquant une personne qui habite à proximité du pré communal du village – se trouve seulement en East Anglia, donc le domicile de Daphné est l’un des tout petits villages qui parsèment les champs de blé du Suffolk. Cela lui donne un héritage très Anglo-Saxon, grande , blonde et aux yeux bleus. Elle doit passer ses vacances d’été à se promener en bateau sur les Lacs du Norfolk et du Suffolk.

Tracey Davis n’a pas encore fait d’apparition dans le canon. La première fois que j’ai vu le nom sur la liste d’élèves, j’ai sauté à la conclusion élaborée qu’elle était une soeur de Roger Davies, peut-être tellement jalouse de son frère aîné intelligent et athlétique qu’elle supplia le Choixpeau magique de ne pas l’envoyer à Serdaigle. J’ai dû abandonner cette théorie quand je me suis rendu compte que le nom de Tracey s’écrit différemment de celui de Roger, sans E ; “Davis” est un nom si courant que JKR ne s’est probablement pas souvenue qu’elle l’utilisait pour la deuxième fois. (Mais le fond de mon cerveau insiste toujours que JKR avait l’intention de faire de Tracey la soeur de Roger, et a simplement mal écrit le nom sur la liste d’élèves.)

“Tracey” vient d’un nom de lieu qui en fin de compte signifie quelque chose comme “courageaux”. C’était un prénom féminin en vogue dans les années 60, en particulier dans les classes ouvrières, mais depuis 1980 il est passé de mode. “Davis”, qui signifie “fils du bien-aimé”, était au départ un nom gallois, mais il est si courant qu’on le trouve maintenant partout en Grande-Bretagne. C’est à Londres qu’on trouve de loin la plus grande concentration de familles Davies, donc, en l’absence de meilleur indice, nous allons laisser Tracey habiter dans le quartier ouvrier de Camden dans le nord de Londres. Je doute qu’elle doive apprécier les avantages de vivre si près du British Museum ou de Hampstead Heath, mais Camden la place très près de la Gare King’s Cross. On dirait que Tracey n’a aucune relation prestigieuse – chez les sorciers comme chez les moldus – et elle est aussi une sang-mêlée, donc elle sera obligée de rire aux blagues de Pansy et de satisfaire aux caprices de Pansy si elle veut survivre à Serpentard.

Le garçon du Sombral et le latin lover : Theodore et Blaise

Theodore Nott, nous dit-on, est plus intelligent et plus indépendant que Drago Malefoy, mais d’apparence il est “filiforme” et “efflanqué”. Sa mère est morte, et son père est un assassin – on se demande dans quel sens ce garçon est un “cadeau des dieux”, comme son prénom le promet. “Theodore” n’a jamais été un prénom courant en Grande-Bretagne, et il sonne plutôt prétentieux.

“Nott”, qui est un nom de West Country, signifie réellement “lisse” ou “arrondi” et fait allusion à une coiffure aux cheveux courts, mais ça sonne aussi comme “nuit”, ce qui suggère que c’est une famille de sorciers “noirs”. Le nom peut aussi être un jeu de mot avec “not” (Ndt : la négation en anglais), parce que Theodore a une nature quelque peu contrariante, et il est possible qu’il ne fera pas ce que son père lui dit de faire. Puisque Mr Nott est un sorcier sang-pur “très âgé”, il a probablement eu à peu près une centaine d’années pour construire sa fortune, alors l’efflanqué Theodore et son ignoble père vivent probablement dans une banlieue chic de Bristol.

Blaise Zabini, sommairement attribué à Serpentard dans son seul moment dans le canon, a fasciné les fans à cause de son prénom excentrique. Certains ont même supposé que “Blaise” était un prénom de fille, bien que son usage dans la vie réelle soit masculin, et dans une récente interview JKR a évoqué ce personnage en disant “il”.

Les stéréotypes de ce mystérieux personnage dans les fanfics le décrivent souvent comme un latin lover – un méditerranéen, très beau garçon, peut-être quelqu’un qui met son charme à profit pour séduire les filles naïves. C’est sans doute parce que “Zabini” est le nom italien par excellence : il signifie “fils de la Sabine”, les Sabines étant les habitantes d’origine de Rome. Cependant, l’identité de M. Zabini n’est pas aussi simple que “l’homme d’italie”, car son prénom est français (peut-être qu’il a une mère française). Alors peut-être que JKR le destine à représenter, plus généralement, “les Européens”. “Blaise” signifie “bègue” ; ce prénom a d’évidentes connotations magiques, puisque le grand sorcier Merlin a appris la magie et les principes moraux auprès d’un maître sorcier nommé Blaise. Il y a aussi Blaise Pascal, le mathématicien qui avait fait un pari avec Dieu : on se demande si Blaise Zabini va aussi devenir un parieur, ou du moins un pragmatique machiavélique.

Les ancêtres italiens (et français ?) de Blaise ont dû s’installer dans une ville britannique pendant le dix-neuvième siècle. Blaise a dû naître dans une famille complètement intégrée à la société britannique, et il ne parle probablement pas italien. Plaçons-le au milieu des théâtres, des parcs, des monuments historiques et des boutiques snob de Richmond, un faubourg à l’ouest de Londres.

Les anonymes et non-répartis : Moon, Perks, Rivers, Roper, Runcorn et Spinks

Cela laisse six élèves pour qui nous n’avons pas de Maison, et six places vacantes dans les Maisons (deux à Gryffondor et deux à Poufsouffle, un à Serdaigle et un à Serpentard).

Moon est présent à la Répartition, mais on n’apprend pas le prénom ou la Maison de cet élève. La liste d’élèves montre que son prénom commence par les lettres “Lil…”, ce qui suggère “Lillian” ou “Lilith” (je ne pense pas que JKR aurait donné à un personnage secondaire le même prénom qu’à la mère de Harry). C’est un prénom très évocateur : Lilith était démon de la nuit persan, et il y a des légendes apocryphes mais persistantes selon lesquelles elle était la première femme d’Adam ; tandis que “Lillian” est encore un autre prénom en “lily”.

Le nom “Moon” a peut-être été destiné à nous rappeler la lune (Ndt : “lune” se dit “moon” en anglais) – il se peut que ce personnage ait été une proto-Luna, ensuite abandonnée une fois que JKR a décidé de mettre Luna dans une autre année que celle de Harry. Cependant, le nom ne se réfère pas à la lune, à l’origine : c’est probablement une déformation de l’irlandais “O’Mochain”, et signifie quelque chose comme “ponctuel” ! Cela doit suggérer une personne méthodique, quelque peu ennuyeuse, formant un contraste saisissant avec son prénom fascinant. Peut-être qu’elle est le prototype de l’élève discrète dont la réserve cache une richesse d’imagination et de secrets intimes.

JKR envisageait apparemment d’appeler cet élève “Malone”, qui est aussi un nom irlandais et signifie “chauve John” – le John d’origine étant chauve parce qu’il était un moine. Les noms “Malone” et “Moon” prédominent dans la belle ville de Dublin, ce qui suggère que Miss Moon habite la capitale de l’Irlande, la ville de U2 et Riverdance, et le centre de la lingerie fine et du cristal. Si son attention n’a pas été détournée par des sports moldus comme le rugby irlandais ou les courses de lévriers, elle doit soutenir les Crécerelles de Kenmare.

Sally-Anne Perks ne peut pas être à Serdaigle, où le dortoir des filles est plein. En suivant une intuition fondée sur la manière dont JKR a appelé ses personnages, je dirais qu’elle n’est pas susceptible d’être à Serpentard (parce que “Perks” ressemble trop à “Parkinson”) et pas susceptible non plus d’être à Gryffondor (parce qu’on a déjà deux noms qui commencent par P à Gryffondor). Le prénom “Sally-Anne” a une consonnance honnête, franche qui irait bien à Poufsouffle. “Sally”, un diminutif de “Sarah”, signifie “princesse”, tandis que “Anne”, qi signifie “grâce”, était le prénom de la mère de JKR. “Perks” est “fils de Peter”, et indique un domicile dans les West Midlands – disons dans la ville historique de Shrewsbury dans le Shropshire, un bon endroit d’où soutenir les Tornades de Tutshill (situées près de la maison d’enfance de JKR à Chepstow).

Rivers, indiquant quelqu’un qui “habite près de la rivière”, est un nom qu’on trouve dans le sud de l’Angleterre. Après avoir éliminé les endroits inadéquats, on peut placer cet élève au milieu des vergers du Kent, sûrement le comté qui a inspiré la chanson sur les jardins anglais, peut-être dans la célèbre ville épiscopale de Canterbury elle-même. Malheureusement, le nom “Rivers” est trop ambigü pour nous en dire beaucoup sur cet élève. Il pourrait désigner quelqu’un qui est absolument nécessaire pour dispenser “l’eau de la vie”. A part ça, la première idée de JKR pour le nom de cet élève commençait par “Qui…”, ce qui nous fait penser au Professeur Quirrell, qui tremble et frémit dans une peur simulé qui dissimule sa soif de pouvoir. “Rivers” pourrait aussi indiquer un tempérament faible, instable comme l’eau – une rivière est toujours en mouvement mais elle ne peut se contenir ou définir sa propre forme.

Roper indique un “fabricant de corde”, un humble artisan qui accomplit un travail honnête labour. On se demande si ce personnage est censée être “encordable” (crédule), ou si elle est une Serpentard qui tient métaphoriquement la corde du pendu. Son prénom commence par les lettres “So…” ; peut-être que c’est “Sophie”, du mot grec pour “sagesse”. Elle doit vivre dans le Yorkshire, dans une ville comme Harrogate ou Barnsley. Ces villes se sont développées sur les industries du textile et du charbon, mais elles ont subit de sérieuses difficultés économiques dans les années 80 quand ces industries indispensables ont fermé. Barnsley a même été nommée la “pire ville de Grande-Bretagne”. Les parents de Miss Roper ont dû subir les épreuves du chômage de longue durée, et ils ont certainement appris à leur fille à économiser son argent.

Runcorn, qui signifie “baie sauvage”, est une petite ville du Cheshire. Puisque le nom a dû être donné à quelqu’un qui est parti de Runcorn, mais qui n’a probablement pas été bien loin, ce n’est pas surprenant de trouver ce nom d’une manière prédominante à Liverpool. Cette ville industrielle avec ses quartiers de docks est le domicile traditionnel des ouvriers. L’habitant type de Liverpool est indépendant, assez caustique, et a un talent pour la survie – ce n’est pas un hasard si cette ville a produit les Beatles.

Spinks. Ce nom se trouve dans l’est de l’Angleterre : par élimination, on peut situer Spinks dans le Lincolnshire. Ce comté est considéré comme un bras de rivière puant – littéralement, bien sûr, parce que c’est la région des Fens (Ndt : plaines marécageuses), mais aussi métaphoriquement. Alors que Lincoln a sa prestigieuse cathédrale et son château, que Boston héberge une formidable foire annuelle, que Gainsborough a d’intéressantes curiosités historiques, et que la campagne est parsemée de bases de la R.A.F. (Ndt : l’armée aérienne, Royal Air Force), en général les jolies maisons et les plaines sont associées à une économie en crise, un style de vie lent et paisible et une absence générale d’action. “Spinks” signifie “pinson”, et c’était un nom donné à quelqu’un de joyeux. Peut-être l’élève Spinks est même un chanteur talentueux. Espérons qu’il ou elle combine la magie, la musique et l’optimisme pour créer sa propre stimulation.

Conclusion

Chacune de ces théories peut être détruite le 16 juillet 2005 (Ndt : la date de sortie du tome 5, en v.o. bien sûr). Si JKR décide de nous dire que Ernie a toujours vécu à Leicester ou que la famille Hopkins est millionnaire ou que Su Li a les yeux bleus, c’est son droit. Mais même si elle glisse ces surprenantes révélations, je serais très surprise que l’ensemble de ces histoires d’arrière-plan échoue à représenter un microcosme des îles britanniques. Et toutes ces révélations ne feraient que souligner l’essentiel : chacun de ces élèves a une histoire.

Le monde magique est maintenant en guerre, et la neutralité n’est plus possible pour ces élèves. Il se pourrait que leurs choix aient un impact significatif sur l’issue finale de la guerre et de l’intrigue. Ce que la liste d’élèves nous montre c’est qu’aucun d’eux ne choisira au hasard. Les élèves sont tous des personnalités complètes, chacun avec un héritage génétique, un environnement et une liberté de choix. Chaque personnage fera naturellement les choix de cette personnalité.

Ainsi qu’elle l’a toujours promis, JKR sait déjà la destinée finale de chacun d’eux.

Note de l’auteur : cet essai a été complété avec l’aide et le soutien de J. Forias, qui est excellent en logique formelle ; Darker_Rage, qui a une grande connaissance de la géographie de la Grande-Bretagne et de ses coutumes ;  et Andromeda Nigella, qui a remarqué tous les mots que j’avais oublié quand je tapais trop vite, m’a rendu politiquement correcte, et a appliqué un sens de l’intuition tout à fait britannique.