lundi 23 décembre 2024

Une vision magique du monde

par Steve Vander Ark, le 19/08/2001.

La façon dont pensent les sorcières et sorciers – pour tout, y compris les sortilèges – est complètement différente de la façon dont nous, les Moldus, pensons. Quand on observe le mécanisme de, disons, le lancement d’un sort sur quelque chose, nous nous posons des questions “moldues” comme “doit-on viser ?” qu’ils ne penseraient jamais à se poser. Nous sommes habitués à la physique moldue et aux limites moldues. Les sorcières et sorciers sont habitués à la physique magiques et aux limites magiques. Ça fait toute la différence du monde. De fait, c’est littéralement un monde différent.

Un très bon exemple est la réaction de Molly Weasley devant le fait que la Ford Anglia ait une telle capacité de contenance dans son coffre et qu’on puisse asseoir cinq personnes à l’aise sur la banquette arrière. Ça ne lui semble pas bizarre le moins du monde, puisqu’elle pense avec une logique de sorcier. C’est tellement parfaitement normal pour elle qu’elle suppose même que les Moldus font de même ; elle ne se rend pas compte que c’est unique au monde des sorciers. Mais nous, en tant que Moldus, serions incapables de comprendre comment une telle chose est possible. Notre vision du monde et de la vie et notre tournure d’esprit envers la façon dont les choses fonctionnent sont si différents de la manière dont les sorcières et sorciers le voient que nous avons du mal à comprendre comment la magie fonctionne. Molly, d’autre part, ne peut pas comprendre notre notion d’espace et de physique à trois dimensions, sur laquelle la science et la technologie sont basées. Une voiture qui ne pourrait pas contenir plus si nécessaire lui ferait marquer un temps de surprise. Rappelez-vous du passage durant lequel Ron tapote le poster de Dean Thomas qui représente l’équipe de foot de West Ham pour essayer de les faire bouger (ES9). Ça n’a simplement pas de sens pour lui.

Considérons que les lois physiques qui gouvernent notre monde – cause et effet, action et réaction, conservation d’énergie, ce genre de choses – sont secondaires dans la manière magique de voir les choses. Pour eux, la clé est l’intention et la force. Molly a-t-elle besoin de voir quelque chose pour attirer quelque chose à elle avec un sortilège d’Attraction, ou même de savoir exactement ce que c’est ? Non. Elle a l’intention et la force de faire en sorte que ce sortilège fasse exactement ce qu’elle veut (CF6 par ex.). Harry, quand il l’apprend, a besoin de préciser, et même de voir l’objet en question. Mais au moment où il attire vers lui la Coupe du Tournoi des Trois Sorciers dans le cimetière (CF34), il a toute l’intention et la force dont il a besoin, presque sans s’en rendre compte, pour faire venir à lui exactement ce qu’il veut. Sa cible n’a pas besoin d’être précisée grâce à la concentration désespérée de son propre esprit.

Une fois que nous libérons nos esprits du carcan de la physique moldue, la magie commence alors à être plus compréhensible, et il devient vite évident que la pratique de la magie est vraiment la manipulation de la puissance magique par l’intention et la concentration (au moyen d’une baguette et de mots, généralement) du jeteur de sort. La physique exacte du sortilège – comment il fonctionne, comment il est lancé, ce qu’il fait – peut être différente à chaque fois, car si les lois physiques ne sont pas compliquées, les émotions et les intentions le sont.

Cela signifie qu’un sortilège pourrait avoir un effet sensiblement différent selon les circonstances de son lancement (tel que l’Expelliarmus qui projette Lockhart contre le mur, puisque les intentions de Rogue ont provoqué un résultat un peu plus violent [CS10]). Cela signifie aussi que Hermione peut créer un sortilège sur le moment (Mobiliarbus, qui suggère littéralement déplacer un arbre… Vous ne me ferez pas croire que cette élève de Poudlard de troisième année a appris les sorts pour déplacer un arbre… Elle l’invente sur le moment, utilisant son intention et sa compréhension de la langue des formules magiques) (1). Dans sa forme la plus pure, la magie ne requiert ni mots, ni même baguette. On voit Dumbledore utiliser la magie ainsi, ou d’une manière proche, presque à chaque fois qu’il en fait.

Il existe trois facteurs déterminants à la création d’un sortilège, et les lois physiques ne s’y mêlent pas du tout. Ces trois facteurs sont l’intention, la concentration de la puissance et la concentration de l’esprit. L’intention vient en premier, évidemment, puisque le jeteur de sort a besoin de vouloir faire quelque chose. Puis les mots de la formule sont utilisés pour concentrer l’esprit sur l’action désirée, parfois avec l’aide d’un caractère de pensée précis. Ces deux sont liés, puisque les mots commandent souvent les processus mentaux, mais parfois un certain type de pensée est requis en premier, comme par exemple la pensée heureuse pour déclencher une défense contre les Détraqueurs. La baguette est ensuite agitée en un mouvement précis pour concentrer et diriger la puissance magique du corps du jeteur de sort vers la cible. Toutes ces choses fonctionnent ensemble pour donner un résultat qui n’obéit simplement à aucune de nos lois scientifiques moldues. Mais la clé de toute l’histoire est l’intention (2).

Si nous pensons comme les Moldus, c’est vraiment, absolument, incroyablement stupéfiant. C’est une partie de ce qui fait que les livres sont si divertissants. Mais si nous pouvions vraiment penser comme les sorciers, ça serait complètement normal, voire banal. Et pour vous divertir, vous liriez les bandes dessinées de Martin Miggs, le Moldu Fou.

Notes

(1) Hermione doit avoir mémorisé bon nombre de sortilèges spéciaux – Alohomora vient à l’esprit – mais je ne crois toujours pas qu’elle a appris un sort qui déplace un arbre. Ce n’est même pas un sortilège logique à retenir. Ce qui a beaucoup plus de sens, c’est qu’elle comprend la racine des mots et n’a aucun problème à créer les formules dont elle a besoin au moment où elle en a besoin. Après tout, pour déplacer Rogue dans PA19, ils ont utilisé Mobilicorpus, qui est en gros le même sortilège avec un différent objet déplacé (“corpus” signifie en latin “corps”, tandis que “arbus” désigne un arbre). Hermione, intelligente comme elle est, a vite dépassé le stade de simplement répéter les formules des sortilèges et a saisi la logique sous-jacente du concept. Elle ne connaît pas un sortilège spécifique pour déplacer un arbre, mais lorsqu’elle a besoin d’en déplacer un, elle sait comment créer la formule correcte. Alohomora, d’autre part, est un sort très mystérieux. L’étymologie n’est assurément pas du simple latin comme tant d’autres. Il est spécifiquement désigné comme “son” sortilège. Il semble assez évident que Alohomora est l’un de ceux qu’elle a déniché dans quelque livre poussiéreux quelque part dans la bibliothèque, en faisant un peu de lumière pendant qu’elle lisait. Et quand elle l’a repéré, elle a bien sûr vu son utilité et l’a mémorisé. Mais Mobiliarbus ? Vous pensez qu’elle l’a vu et qu’elle s’est dit: “Eh bien, on ne sait jamais, si je devais déplacer un arbre !” ? Non, c’est un sortilège de sa propre invention, improvisé sur le moment en utilisant sa compréhension de la façon dont fonctionne la magie. C’est totalement logique et cela montre réellement à quel point elle est en avance sur son âge, si vous y réfléchissez. C’est un bon exemple du travail de l’esprit de quelqu’un qui a obtenu plus de cent pour cent de bonnes réponses à un test d’enchantements (Ndt: OP31).

(2) Encore un mot sur les formules des sorts et les intentions : pensez au Wingardium Leviosa. Ces mots signifient faire léviter une plume (ici la racine “wing” n’est bien sûr pas du latin, qui n’a pas de lettre ‘w’, mais se rapporte à l’objet qu’ils sont censés faire léviter [Ndt : “wing” signifiant bien sûr “aile” en anglais]). Mais plus tard, Ron, qui n’a pas encore bien appris ce sort, utilise ces mots pour faire léviter le gourdin d’un troll ! Comment est-ce possible ? C’est parce que son intention entrait en jeu, et son esprit était totalement concentré sur ce qu’il voulait faire. Les mots qu’il a prononcés étaient ceux dont il pensait qu’ils feraient léviter n’importe quoi, puisqu’il ne comprend pas vraiment ce que signifie la phrase, et c’est assurément le cas. Puisqu’il croyait que ces mots auraient cet effet, ils ont suffi à concentrer ses pensées. Hermione, quand elle était en troisième année, aurait utilisé “Clava Leviosa” à la place, que quelqu’un lui ait dit la formule précise ou pas. Si elle n’avait pas eu en tête le mot latin pour “gourdin”, elle aurait juste dit “Leviosa” et se serait concentrée sur le gourdin.